Chaque 28 Septembre, le monde célèbre la Journée Internationale du Droit à l’Avortement Sécurisé. Et le thème retenu pour l’édition 2023 est : « Ensemble, faisons entendre notre voix et affirmons que l’Interruption Volontaire de la Grossesse est un droit humain essentiel pour garantir l’égalité, la dignité et la liberté des femmes ».
A la faveur de cette célébration, l’Association des Femmes Juristes de Côte d’Ivoire ( AFJCI) a organise une conférence de presse autour de la question des Droits en Santé Sexuelle et reproductive (DSSR) y compris les soins sécurisés d’avortement en Côte d’Ivoire ce jeudi 28 Septembre à la Maison de la presse.
Cette conférence avait pour objectif d’interpeller les autorités et acteurs politiques sur la situation de la santé de la reproduction des femmes et des filles en Côte d’Ivoire notamment les risques liés aux restrictions au droit à l’avortement sécurisé.
Ce fut l’occasion pour l’Association des Femmes Juristes de Côte d’Ivoire (AFJCI) et ses partenaires à savoir la Société de Gynécologie et d’Obstétrique de Côte d’Ivoire ( SOGOCI) et le Réseau Action contre les Grossesses non Désirées et à Risque ( AGnDr) de réaffirmer leur engagement en faveur des droits des femmes notamment le droit à l’autonomie corporelle, à la santé reproductive et au choix en matière de procréation.
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En tant qu’activiste des droits des femmes, j’ai été conviée à cette conférence de presse. Au sortir de cette conférence, je partage avec vous 3 grands points sur l’état des lieux de l’avortement sécurisé en Côte d’Ivoire.
- L’Avortement sécurisé est un droit.
Selon le Protocole à la charte africaine des droits de l’homme et des peuples relatifs aux droits de la femme, communément appelé Protocole de Maputo qui a été signé et ratifié en 2012 par la Côte d’Ivoire, les femmes doivent accéder à l’avortement sécurisé dans les conditions suivantes :
- la femme a été victime d’agression sexuelle,
- La femme a été victime de viol.
- La grossesse est issue d’une relation incestueuse.
- La grossesse met en danger la santé physique de la mère.
- La grossesse met en danger la santé mentale de la mère.
- La grossesse met en danger la vie de la mère ou celle du fœtus.
Cependant, aux termes du code pénal ivoirien, relativement aux articles 425 à 427 de la loi N°2019-574 du 26 Juin2019portant code pénal; l’avortement est interdit en Côte d’Ivoire , sauf en cas de viol et lorsque la vie de la mère est menacée. Ce cadre légal restrictif a pour conséquence de faire prospérer les avortements clandestins avec tous les risques encourus au mépris de l’article 14.2C du Protocole de Maputo.
Madame Boni de l’AFJCI a relevé que l’un des points essentiels du plaidoyer pour l’avortement sécurisé en Côte d’Ivoire est l’harmonisation de l’Article 14.2C du Protocole de Maputo et la loi ivoirienne sur l’avortement. Elle n’a pas manqué de souligner que si les conditions telles que prévues par le protocole de Maputo sont pris en compte par le législateur ivoirien, les vies de nombreuses adolescentes et des femmes ivoiriennes seront préservées.
2. En Côte d’Ivoire, 4% des femmes en âge de procréer subissent un avortement clandestin chaque année.
Selon l’enquête Performance Monitoring and Accountability 2020 (PMA2020), 230 000 avortements sont pratiqués chaque année en Côte d’Ivoire, ce qui représente 4% des femmes en âge de procréer (15-49 ans). 6 sur 10 de ces avortements sont à risque car impliquant des méthodes peu conventionnelles et non recommandées.
Pour Madame Agathe Blanc de l’AFJCI, ces chiffres sont alarmants. Et au regard de ce constat, il est important que la sensibilisation et le plaidoyer soient intensifiés.
3. 18 % des décès maternels en Côte d’Ivoire sont dus aux avortements clandestins
Selon l’Enquête Démographique et de santé de 2021, le taux de mortalité maternelle était de 385 décès pour 100.000 naissances vivantes. Et 18% de ces décès sont la résultante d’un avortement clandestin.
L’état des lieux montre qu’il est plus que nécessaire de créer les conditions pour que toutes les femmes puissent accéder à l’avortement sécurisé. Et l’AFJCI et ses partenaires entendent mener le plaidoyer auprès des décideurs afin que l’Article 14.2C du Protocole de Maputo soit appliqué dans son intégralité en Côte d’Ivoire.
Par Rita Pascale Kwaminan